L’espace d’un songe – Sophie Cavaliero – 2012

Entrer dans l’univers de Sylvie Tubiana, c’est ne pas oublier de s’éveiller.
Faire un pas dans les espaces transformés par Sylvie Tubiana, c’est se perdre dans le noir pour se retrouver aussitôt en pleine lumière et mieux se reconnaître. Exister.
Ressentir les oeuvres de Sylvie Tubiana, c’est oser ne plus se cacher dans l’ombre pour montrer ses propres lumières au travers de la projection du corps métamorphosé de l’artiste, sensuelle et distante.
Ecouter le récit de Sylvie Tubiana, c’est croire que le blanc et le noir peuvent vous raconter une histoire des temps anciens.
Ce temps des origines, aussi loin que remonte le nom de Tubiana, en ce temps où l’artiste rampait sous terre pour aller peindre le quotidien sur les parois des entrailles de notre planète.
J’approche les photographies de ces femmes tatouées, cherchant tout à coup les origines de mes désirs dans le regard posé de Sylvie Tubiana sur ces anciennes gravures, regard qui me rappelle cette image d’un danseur de butō transformé dans son mouvement par la projection d’une estampe érotique*.
Amoureuse indéniable du Japon, je ne peux que me sentir attirée par cette étonnante retranscription
d’images, que l’artiste a superposées à un corps qui n’est pas le même mais pourtant si semblable.
J’ai cette soudaine envie de me mettre nue et de confronter mon propre reflet aux images de ces gravures d’une autre époque, d’un Japon fantasmé et de continuer ce jeu de fausses images criantes de vérités.
Chaque photographie est une évidence pour tout à coup être un soupçon de piège pour l’oeil trop sûr de lui de ne voir qu’une image. Chaque photographie est une construction de sensations et d’émotions, catalysant toutes sortes de récits.
Chaque photographie a ce rapport étrange à l’écriture qui se délie facilement à son contact, entraînant le spectateur dans le conte de l’histoire qui jaillit dans sa tête, ombre d’un monde de faux semblants, et résultat d’une présence insaisissable que l’on se surprend à guetter.
Entrer dans l’univers de Sylvie Tubiana, c’est ne pas oublier de s’éveiller et d’écouter ses propres voix pour comprendre et savourer les émotions de ces « JAPONS » qui se dévoilent en cette exposition, envoûtant le visiteur l’espace d’un songe.

* œuvre produite par Eikoh Hosoe, lors d’un spectacle de danse dans la galerie Acte 2 en 2003
auteure de “Nouvelle Garde” aux éditions Le Lézard Noir

 

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